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Absence
Ce n'est pas dans le moment
où tu pars que tu me quittes.
Laisse-moi, va, ma petite,
il est tard, sauve-toi vite !
Plus encor que tes visites
j'aime leurs prolongements.
Tu m'es plus présente, absente.
Tu me parles. Je te vois.
Moins proche, plus attachante,
moins vivante, plus touchante,
tu me hantes, tu m'enchantes !
Je n'ai plus besoin de toi.
Mais déjà pâle, irréelle,
trouble, hésitante, infidèle,
tu te dissous dans le temps.
Insaisissable, rebelle,
tu m'échappes, je t'appelle.
Tu me manques, je t'attends !
Paul Géraldy (1885-1983)
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Déclaration
Femme, sitôt que ton regard
Eut transpercé mon existence,
J'ai renié vingt espérances,
J'ai brisé, d'un geste hagard,
Mes dieux, mes amitiés anciennes,
Toutes les lois, toutes les chaînes,
Et du passé fait un brouillard.
J'ai purifié de scories
Mes habitudes et mes goûts ;
J'ai précipité dans l'égout
D'étourdissantes jongleries ;
J'ai vaincu l'effroi de la mort,
Je me suis voulu libre et fort,
Beau comme un prince de féerie.
J'ai franchi les rires narquois,
Subi des faces abhorrées,
Livré mes biens à la curée
Afin de m'approcher de toi.
Devant moi hurlaient les menaces,
J'ai méprisé leurs cris voraces
Et j'ai marché, marché tout droit.
J'ai découvert, pour mon offrande,
Un monde fertile en plaisirs ;
J'ai pesé tes moindres désirs,
Je sais où vont les jeunes bandes,
Je connais théâtres et bals ;
J'ai dans les mains un carnaval,
Dans le cœur, ce que tu demandes.
Pour la rencontre, j'ai prévu
Quand je pourrais quitter l'ouvrage,
La route à suivre, un temps d'orage,
Et jusqu'au perfide impromptu.
J'ai tremblé que point ne te plaisent
Les tapis, les miroirs, les chaises.
J'ai tout préparé, j'ai tout vu.
J'ai mesuré mon art de plaire,
Mes faiblesses et ma fierté,
Les mots, l'accent à leur prêter ;
J'ai calculé d'être sincère,
Triste ou gai, confiant, rêveur.
Je me suis paré de pudeur,
De force et de grâce légère.
Et me voici, prends-moi, je viens
Frémissant, comme au sacrifice,
T'offrir, à toi l'inspiratrice,
Mon être affamé de liens,
Mon être entier qui te réclame.
Donne tes mains, donne ton âme,
Tes yeux, tes lèvres... Je suis tien...
Alphonse Beauregard (1881-1924)
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Sous le ciel
Au beau ciel d'été le jour vient de naître ;
Les petits oiseaux confondent leurs chants ;
La clarté nouvelle emplit la fenêtre
Et l'on sent l'odeur de l'herbe des champs.
Le soleil reluit sur les feuilles vertes
Qui tremblent au vent léger du matin.
Respirant l'air bleu, les fleurs sont ouvertes :
Somptueux velours et riche satin.
Épris de beauté devant la nature,
Vers le firmament je tourne les yeux ;
L'espace infini, la lumière pure
Émeuvent le cœur d'un rythme joyeux.
Et cette splendeur qui charme et console
Par l'homme n'est pas regardée en vain :
Le meilleur de lui dans l'azur s'envole
Sur les ailes d'or d'un rêve divin !
Albert Lozeau ( 1878-1924 )
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ECRIRE ici
J'attends ...
J'attends. Le vent gémit. Le soir vient. L'heure sonne.
Mon cœur impatient s'émeut. Rien ni personne.
J'attends, les yeux fermés pour ne pas voir le temps
Passer en déployant les ténèbres. J'attends.
Cédant au sommeil dont la quiétude tente,
J'ai passé cette nuit en un rêve d'attente.
Le jour est apparu baigné d'or pourpre et vif,
Comme hier, comme avant, mon cœur bat attentif.
Et je suis énervé d'attendre, sans comprendre,
Comme hier et demain, ce que je puis attendre.
J'interroge mon cœur, qui ne répond pas bien ...
Ah ! qu'il est douloureux d'attendre toujours - rien !
Albert Lozeau ( 1878-1924)